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Le goût des livres

  • Pause

    Le moment des vacances est venu ; je pars m'oxygéner dans les montagnes que j'aime. Le repos est au programme, la lecture, le farniente et pour le reste ce sera selon les jours et les envies.

    Je vous souhaite un beau mois de juin et vous donne rendez-vous début juillet.

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  • Bon dimanche

    Une chanson du grand Jacques qui pourrait être écrite aujourd'hui ..

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  • Coupez !

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    "Elle avait connu tant de médiocres qui avaient réussi, sans être troublés par le syndrome de l'imposteur qui interdisait presque à un gamin comme Jérôme de s'imaginer capable d'atteindre les sommets. Des gens qui étaient allés tellement plus loin que leur talent n'aurait dû le leur permettre, artificiellement soutenus par leur confiance de privilégiés, par l'inflexible certitude que tout leur était dû et par un népotisme pur et simple. Bon sang, il n'y avait qu'à regarder la composition du gouvernement britannique actuel, où le Médiocre en chef régnait sur un genre de méritocratie, mais inversée".

    Ce polar est arrivé chez moi un beau jour, sans que je l'ai demandé et comme je n'avais pas été emballée par un premier titre (Sombre avec moi) je l'ai laissé de côté.

    Il faut que je vous dise que je fais (en tout cas j'essaie) un grand ménage dans mes livres et les piles montent, une pour le bouquiniste du coin, une pour Emmaüs, une pour la boîte à livres, le reste je garde. "Coupez" a failli aller chez le bouquiniste, mais j'ai décidé de lui donner une chance et je ne l'ai pas regretté.

    J'ai donc fait la connaissance de Millicent, récemment libérée après une détention de vingt-quatre ans pour le meurtre de son amant. Elle sort à 72 ans, dépassée par le monde qu'elle retrouve et qu'elle ne reconnaît pas.

    Elle trouve refuge auprès de deux autres vieilles dames, dont une, Clara, a entrepris de la réinsérer à sa manière, en lui donnant une tâche différente chaque jour pour lui faire reprendre contact avec le quotidien.

    Dans sa vie d'avant, Millicent était spécialisée dans le maquillage et les effets spéciaux dans des films d'horreur de série B, ce qui nous vaut quelques descriptions assez gores. Elle était excellente dans son métier et fréquentait un milieu aussi glauque qu'on peut l'imaginer, avec des personnalités plus ou moins troubles, mais peu lui importait tant qu'elle travaillait.

    Le hasard met sur sa route Jérôme (alias Jerry) étudiant en cinéma en délicatesse avec son entourage et cohabitant chez Clara pour s'éloigner des étudiants qu'il connaît un peu trop.

    A la surprise de Millicent, Jerry connaît Mancipium, fameux film maudit qui n'a jamais pu être terminé et dont les bobines ont disparu. Dans le même temps, Millicent découvre une photo qui remet complètement en cause la version du meurtre de son amant. Elle n'a pas réussi à convaincre de son innocence jadis et cette photo la fait gamberger ; suffisamment pour partir en Europe avec Jerry à la recherche de la vérité.

    Les voilà partis dans un road trip mené tambour battant, dangereux et parsemé de cadavres. Sans le vouloir Millicent est devenue une cible en remuant le passé, ce qui la fait redoubler d'ardeur. 

    Le duo improbable du départ se révèle de mieux en mieux rôdé. Millicent a un sacré caractère, mais son expérience de la prison l'a rendue souvent frileuse, ce qui ne l'empêche pas de bouillir intérieurement. Jerry lui, se sentira toujours illégitime dans le milieu où il est parvenu. Ils vont s'entraider et se booster mutuellement quand il le faut. Et il y a cet amour d'un certain cinéma qui les lie plus que tout.

    C'est ce tandem qui fait l'intérêt du livre, avec un humour assez dévastateur sur la société en général et le microscome du cinéma d'horreur en particulier. Le passage des fugitifs à Paris est assez savoureux. Après un démarrage un peu lent, le rythme accélère et le suspense est permanent.

    Je n'ai pas toujours bien suivi les multiples ramifications de l'histoire mais ce n'est pas grave. Je voulais surtout connaître la fin.

    L'avis de Cathulu

    Chris Brookmyre - Coupez - 512 pages
    Traduit de l'anglais (Ecosse) par David Fauquemberg
    Editions Métailié - 2022

  • Dans les brumes de Capelan

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    "Même ses vacances, une à trois semaines deux ou trois fois par an, il les passait seul, dans cette résidence où personne n'était jamais entré. Il devait aimer lire, se disait-on, écrire peut-être, et si c'était ses mémoires, la question était de savoir ce qu'il allait pouvoir mettre dedans, puisque rien des années passées ici n'aurait pu remplir un chapitre. Voilà l'idée que l'on se faisait de Coste, sans imaginer une seconde que pendant ses supposées vacances il avait recueilli les confidences des pires ordures de la criminalité organisée et, par sa seule parole, décidé de leur avenir, sauvés ou sacrifiés, lui, le capitaine lisse et conciliant qui n'emmerdait jamais personne dans sa maison suicidaire au bord du précipice."

    J'ai quitté le Capitaine Coste en bien mauvais état à la fin de "Surtensions". Je ne pouvais pas rester trop longtemps dans cette incertitude, sachant qu'il réapparaissait dans un contexte très différent.

    Il a donné sa démission de la police, mais est nommé quand même à un poste secret défense, dans l'Archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon, battu par les vents, la neige et le froid, sans compter les fameuses brumes saisonnières qui brouillent tous les repères. Il participe à un programme de protection des témoins, en général des repentis et après les avoir étudiés sous toutes les coutures, c'est lui décide de leur sort.

    Une affaire particulièrement difficile s'annonce. En France on vient de retrouver une jeune fille vivante, la dixième d'une série dont aucune n'a survécu. Le tueur est en cavale et lancé sur les traces de la rescapée, Anna Bailly. La hiérarchie de Coste décide de l'envoyer dans la forteresse pour la mettre à l'abri et essayer de la faire parler. Qu'a dû faire cette jeune fille pour rester en vie si longtemps (dix ans), alors que les autres ont été tuées rapidement ? Elle les a toutes connues et a été leur compagne d'enfermement pendant quelques jours ou quelques semaines.

    Encore un livre de d'Olivier Norek que l'on ne peut pas lâcher une fois qu'on l'a commencé. Dans celui-ci la tension est constante et augmente encore avec l'arrivée d'Anna.

    Il y a d'un côté l'atmosphère particulière de l'île, les relations que Coste a pu s'y faire. Il s'arrange pour ne déranger personne et attend la même attitude vis-à-vis de lui.

    Et il y a le face à face Coste-Anna, qui va évoluer sans cesse et souffler le chaud et le froid. C'est une jeune personne énigmatique, perturbée et bousculée par les derniers évènements. Tantôt fragile, tantôt manipulatrice, elle embarque Coste dans une relation complexe et on ne sait pas toujours qui mène le jeu.

    La paroxysme est atteint avec l'intrusion du tueur sur l'île, au début des brumes qui durent trois semaines. L'auteur va encore arriver à nous surprendre jusqu'à la dernière minute. Plusieurs fois j'ai cru avoir compris ce qui allait arriver et bien non, un revirement de dernière minute m'a scotchée.

    Il ne faut pas être trop difficile sur la vraisemblance de certains développements mais peu importe, c'est un régal de retrouver Coste dans la peau du flic à bout, revenu de tout, confronté malgré lui à ce qu'il a fui. Il est mis à rude épreuve avec Anna dont la psychologie est difficile à saisir et pour cause.

    Une lecture prenante, avec des personnages étoffés et une ambiance angoissante.

    Je rappelle que le Capitaine Coste est présent dans une trilogie :

    Code 93
    Territoires
    Surtensions

    Il n'est pas nécessaire de les connaître pour lire celui-ci, mais c'est mieux.

    L'avis de Dasola Enna Ingannmic Violette

    Olivier Norek - Dans les brumes de Capelan - 480 pages
    Pocket - 2023

  • Mon vrai nom est Elisabeth

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    "J'avais déjà entendu parler de Violette. Elle figurait sur la liste des Femmes Malades de la famille, elle était l'une des preuves, s'il en fallait, que nous devions nous méfier, que le gène pouvait ressortir n'importe où, n'importe quand, comme un flux de sève souterrain qui éclate en certains bourgeons plutôt qu'en d'autres avec la venue du printemps. Cette femme était décédée subitement à quarante ans, à la suite de plusieurs internements psychiatriques. Mais aux dires de tous, il ne s'agissait pas d'un suicide".

    On voit beaucoup ce livre sur la blogosphère, je crois que tout le monde sait maintenant à peu près de quoi il est question. Adèle Yon, comme d'autres jeunes femmes de sa famille se pose des questions sur son état mental, vers l'âge de 25 ans.

    Elle est mal dans sa vie, laisse perdurer une relation malsaine et n'arrive pas à s'en sortir. Serait-il atteinte du même mal que son arrière grand-mère, Elisabeth, dite Betsy, internée pour une schizophrénie ? La rumeur familiale dit que c'est génétique. Point.

    Vraiment ? L'autrice prépare une thèse en sciences humaines, elle décide de la consacrer à l'histoire de Betsy. D'emblée sa grand-mère (fille de Betsy) lui déclare qu'elle approuve sa démarche mais qu'elle ne l'aidera pas et ne veut pas savoir ce qu'elle trouvera. Le ton est donné, Adèle Yon va se heurter au silence familial, allant du refus total aux demi-confidences et souvenirs tronqués.

    Ce qui est tangible, c'est que Betsy, est passée d'une jeune femme vive, intelligente, joyeuse, à cette personne un peu décalée, perdue, la tête déformée par deux trous voyants sur chaque coté. Elle a été internée 17 ans et lobotomisée. Pour rien.

    Au fil des recherches et des rencontres, l'autrice remonte l'histoire de son aïeule. Sa fratrie comptait dix personnes, Elisabeth a eu six enfants, ça fait pas mal de monde à interroger, même si certains ne sont plus en vie.

    Un pas en avant, trois pas en arrière, la démarche d'Adèle Yon n'est pas facile. La famille d'Elisabeth fait partie de la bonne bourgeoisie catholique, on a des principes. C'est trop étouffant pour elle qui veut être libre et attend beaucoup de la vie.

    Sa rencontre avec André, jeune homme bien sous tous les rapports, va être décisive. Elle est belle, intelligente, André tombe amoureux. L'autrice finit par entrer en possession des lettres que les fiancés échangeaient et là on sent bien que ça ne pourra pas aller. André vise ni plus ni moins la sainteté et attend la même chose de sa future épouse, qui de son côté revendique avant tout sa liberté.

    "Vous me dites que je n'aurai aucune responsabilité envers vous. Que vous le vouliez ou non, j'aurai une grande responsabilité. Car le Seigneur a voulu qu'un mari conduise sa femme. Sans doute vous êtes libre, mais jusqu'à un certain point seulement, car je suis votre chef. La Providence m'a institué tel".

    Le mariage se fera après la guerre et très vite, la situation dégénèrera. Six enfants en sept ans. Elisabeth sombre dans la dépression, ne fait pas face à ses obligations. Le conseil des médecins est de continuer à avoir des enfants, une maternité finira bien par la calmer et l'épanouir enfin.

    Evidemment, ça ne marchera pas et Elisabeth est internée à la demande son mari, avec l'accord de son père, Louis. Je ne vais pas trop en dévoiler, mais plus l'autrice entre dans l'histoire, plus elle est révoltante et glaçante.

    Ce qui se dessine c'est qu'Elisabeth n'était pas folle, mais victime d'une société patriarcale, d'un mari autoritaire et tyrannique, d'une famille toxique et d'un monde médical profondément maltraitant surtout sur le corps des femmes.

    Adèle Yon aura des moments de découragement et même abandonnera l'enquête qui la bouscule trop et mène à trop d'impasses. Toujours, un élément inattendu la fera repartir ; elle ira aussi loin que possible dans la connaissance du parcours d'Elisabeth.

    J'ai quelques réserves sur cette lecture, surtout la forme, mais il faut reconnaître qu'il frappe fort. Je l'ai lu dans un état de colère quasi-permanent devant la place assignée aux femmes et le châtiment qui les attend si elles ne s'y conforment pas. Elisabeth a pu sortir de l'internement en 1967, autrement dit quasiment hier. Comment ne pas voir que nous partons de très loin et que chaque acquis est fragile.

    Sur la forme, elle n'est pas toujours évidente. Différents types de typographie sont utilisés, par exemple pour les lettres des fiancés et également les interviews, qui mentionnent la place de chacun. J'ai eu du mal à me repérer au début.

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    J'ai failli caler au milieu du livre à cause d'une description détaillée de l'historique de la lobotomie. Pour moi elle a cassé le rythme de la narration familiale. Si j'avais su, j'aurais zappé le passage et l'aurais repris une fois la lecture terminée.

    Il reste un propos puissant, qui aborde un sujet peu traité, celui de toutes les femmes injustement enfermées. Le pire est que les médecins savaient qu'ils ne guérissaient personne. Le but était de les rendre à leurs familles dociles et conformes à ce que la société en attendait. Comment ne pas être révoltée ..

    Les avis de Cathulu Ingannmic Luocine Sandrine Sandrion etc ..

    Adèle Yon - Mon vrai nom est Elisabeth - 400 pages
    Editions du Sous-Sol - 2025

  • Le vieil incendie

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    "Aussi loin que j'arrive à remonter dans ma mémoire, Vera s'y trouve quelque part. Sauf l'enterrement de notre père, je réalise que je ne partage aucun souvenir d'adulte avec elle.

    J'ai terminé ce roman il y a quelques semaines et je me rends compte qu'il ne m'en reste pas grand chose, ce qui correspond à vrai dire à ce que j'ai ressenti pendant ma lecture.

    Il est question des retrouvailles de deux soeurs, Agathe et Véra, qui ne se sont pas vues depuis des années. Agathe vit et travaille aux Etats-Unis, comme scénariste. Elle s'est quasiment enfuie de la maison paternelle à 15 ans, n'en supportant plus l'ambiance. Elle revient dans le Périgord pour vider la maison familiale qui doit être démolie rapidement. Elles ont 9 jours.

    Véra n'a jamais quitté les lieux. Aphasique depuis l'âge de six ans, c'est devenu une jeune femme autonome qui se débrouille très bien seule. La cohabitation des deux soeurs pendant quelques jours ne sera pas facile. Elles étaient pourtant fusionnelles durant leur enfance, mais Véra a vécu le départ d'Agathe comme un abandon.

    L'histoire est faite d'entremêlements entre le présent et le passé, avec des retours en arrière fréquents, et surtout beaucoup de non-dits. Tout est vague et évanescent, la lectrice devine entre les lignes (quand elle peut).

    Je n'ai pas réussi à cerner les personnages, il m'a manqué de l'émotion, la narration est assez froide, les motivations des uns et des autres restent floues.

    Il y a pourtant de beaux passages, essentiellement sur la nature qui entoure la maison, l'atmosphère assez étouffante d'un bois, les souvenirs du père.

    Pour résumer, je suis passée complètement à côté de cette histoire. Je suis allée malgré tout jusqu'au bout, pensant avoir un déclic à un moment donné. Il n'est pas venu.

    L'avis de Cathulu, nettement plus positive que moi.

    Elisa Shua Dusapin - Le vieil incendie - 144 pages
    Editions Zoé - 2023